Éditions GOPE, 352 pages, 13 x 19 cm, 20 €, ISBN 979-10-91328-15-9

dimanche 19 juillet 2015

Devant le danger, on ne se Thaï pas



Suite à une affaire où il a été accusé de corruption, l’inspecteur Louis Grives du 36, quai des Orfèvres, surnommé Prik, est parti vivre en Thaïlande, pays d’origine de sa mère. Là, il a pris une vie d’agriculteur aidé en cela par ses cousins Sou et Sout, et batifole avec Pim, sa belle voisine. Il ne veut plus entendre parler d’enquête, ni de corruption (ce qui est beaucoup plus difficile dans un pays comme la Thaïlande), mais alors qu’il s’occupe d’une rizière, il découvre un crâne humain. Même s’il n’est pas spécialiste, il voit bien que c’est le crâne d’un Occidental, et il entend bien savoir qui a enterré cet homme sur ses terres. Aidé de Prakash et Vihar, deux amis officiers de la police royale, il part sur des sentiers inconnus à la rencontre de la Confrérie, une organisation mafieuse...

Jeff de Pangkhan vit en Thaïlande et cela se sent. Il accumule les détails du quotidien agricole, de la vie citadine et de sa corruption endémique, des descriptions de la campagne et de ses travaux comme de la grande ville tentaculaire, et a sa propre observation sur la vie politique complexe, les ethnies diverses, les us et coutumes du peuple. Rien ne manque pour asseoir son intrigue dans un exotisme décrit avec soin, fruit d’une longue pratique des mœurs indigènes.

Grâce à quelques relations conservées dans la police locale, l’inspecteur Prik va mener une enquête dont il voit rapidement que cela l’approche un peu trop près des sphères du pouvoir, de ces zones sombres où la corruption atteint des sommets et où la vie humaine n’a pas forcément une grande importance. Surtout, il parvient à découvrir que le crâne est celui d’un Italien qui a été membre de réseaux mafieux, et que sa mort cache surtout des secrets liés au trafic de drogue. Pour s’approcher de la vérité, il a contacté des policiers dont certains mangent peut-être à plusieurs râteliers, ce qui complique l’enquête.

Un os dans le riz est aussi un roman étrange, car, par la suite, on découvrira qu’il fallait vraiment fouiller derrière les apparences et que le mort a été tué pour des raisons « humanitaires », ce que comprend parfaitement l’inspecteur Prik. Même si né et élevé en France, il a assimilé les façons de faire plus exotiques de son pays maternel. La corruption, autant en France qu’en Thaïlande, est décrite comme un phénomène naturel. Le policier ne cherche jamais à se justifier, ni à s’apitoyer. Il y a un côté fataliste – peut-être le flottement du bouddhisme sur les côtes asiatiques –, dans cet inspecteur voltairien, retiré du monde pour cultiver son jardin, mais rattrapé par la modernité et le crime.

Plus que l’enquête, de facture classique, c’est tout le soin apporté à la description de la vie quotidienne, par un personnage qui, jouant sur les deux cultures, peut apporter des détails rarement vus par des touristes, qui fait le charme de ce roman, épisode des aventures de l’inspecteur Prik.

Citation
« Le système pyramidal de redistribution des encaissements divers liés à la fonction de policier est tel que j’en profite largement, c’est vrai, cependant, je ne participe en rien, sauf peut-être en fermant les yeux sur la provenance de ces sommes d’argent. »

Laurent Greusard, jeudi 02 juillet 2015, K-libre.

vendredi 10 juillet 2015

Prik, un homme à la droiture imparfaite



Bonjour Jeff de Pangkhan, je viens de terminer ton livre. Mon avis ne sera pas très différent de celui de tes autres lecteurs.

Ton roman nous fait traverser la moitié du globe terrestre pour nous faire découvrir l’Isan, cette région de Thaïlande où tu as choisi de vivre. Au cours de ma lecture, j’avoue que je me suis précipité sur internet pour partir à la découverte de ce pays de rizières. […]

Je me suis surpris à préférer certains personnages périphériques (notamment Pim, que tu as si bien décrite qu’il me semble la connaître et aussi Jean, le père de Louis – pour moi, il symbolise le bonheur de vivre. J’ai aussi une tendresse particulière, quoique malvenue, pour Vihar, le traître. Les ripoux m’ont toujours fasciné, et celui-là est particulièrement réussi).
Quant à ton personnage central, Prik, le flic eurasien, je l’aurais trouvé manichéen si tu n’avais pris la précaution d’en faire dès le début du roman un homme à la droiture imparfaite.

Félicitations, Jeff, pour ce premier roman, c’est le sans faute. Si tu le permets, je vais quand même émettre une petite critique. J’ai trouvé quelques passages, rares, il est vrai, un peu longuets, comme par exemple quand tes personnages prennent l’avion J’aurais préféré que tu resserres l’action autour de l’intrigue, car je crains que prendre l’avion à Bangkok ne soit aussi ennuyeux que de faire de même à Roissy.

Un grand bravo à toi, Jeff, et j’espère que tu as gardé de l’imagination pour ton prochain roman, que je lirai avec grand plaisir.

Jean-François Berson, auteur de Une chapelle sous la pluie, prix des lecteurs de polar VSD 2015, éditions Les Nouveaux Auteurs, juin 2015.